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I

LA RELIGION DES FORTS

Hénokhia, Cité monstrueuse des Mâles,
Antre des Violents, Citadelle des Forts,
Qui ne connus jamais la peur ni le remords
” . . . .
Leconte de Lisle (Qaïn ; Poèmes Barbares)

Si j’avais à me choisir une devise, je prendrais celle-ci : “Pure, dure, sûre” — en d’autres termes : inaltérable. J’exprimerais par là l’idéal des Forts, de ceux que rien n’abat, que rien ne corrompt, que rien ne fait changer; de ceux sur qui on peut compter, parce que leur vie est ordre et fidélité, à l’unisson avec l’éternel.

Oh, toi qu’exalte la lutte sans fin, fût-elle sans espoir, attache-toi à ce qui est éternel ! Cela seul est ; le reste n’est qu’ombre et fumée. Aucun individu, homme ou bête, aucun groupe d’individus, aucun peuple ne mérite que tu te soucies de lui en tant que tel ; chacun, par contre, mérite, en tant que reflet de l’éternel, que tu te dévoues pour lui jusqu’à la limite de tes capacités. Et les êtres et les groupes naturels d’êtres reflètent l’éternel plus ou moins. Ils le reflètent dans la mesure où ils s’approchent, sur tous les plans, de l’archétype de leur espèce ; dans la mesure où ils le représentent d’une manière vivante. Celui qui ne représente que lui-même, fût-il de ceux qui font et défont l’histoire et dont les noms retentissent au loin, n’est qu’ombre et fumée.

Toi qu’exalte l’image du rocher solitaire livré à tous les assauts de l’Océan battu des vents, battu des flots, frappé par la foudre au fort des tempêtes, sans cesse couvert d’écume furieuse, mais toujours debout, millénaire après millénaire ; — toi qui voudrais pouvoir t’identifier, avec tes frères dans la foi, à ce symbole tangible des Forts, au point de sentir : “C’est nous! C’est moi !”, libère-toi des deux mortelles superstitions: de la recherche du “bonheur” et du souci de l’“humanité” — ou garde-toi d’y jamais tomber, si les Dieux t’ont accordé le privilège d’en être dès ton jeune âge exempt.

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Le bonheur — qui, pour eux, consiste à n’être point contrariés dans leur épanouissement naturel ; à n’avoir ni faim, ni soif, ni froid, ni trop chaud ; à pouvoir vivre librement la vie pour laquelle ils sont faits ; et parfois, pour certains d’entre eux aussi à étre aimés, — devrait être octroyé aux vivants qui ne possèdent pas le mot, père de la pensée. C’est une compensation qui leur est due. Contribue de tout ton pouvoir à la leur assurer. Aide la bête et l’arbre, — et défends-les contre l’homme égoiste et lâche. Donne une brassée d’herbe au cheval ou à l’âne exténué ; un seau d’eau au buffle qui meurt de soif, attelé depuis le lever du jour à sa charrette pesante, sous le ciel brûlant des tropiques ; une caresse amicale à la bête de somme, quelle qu’elle soit, que son maître traite comme une chose ; nourris le chien ou le chat abandonné, et celui qui erre dans la ville indifférente, n’ayant jamais eu de maître; pose pour lui une assiette de lait au bord du chemin, et flatte-le de la main, s’il te le permet. Porte le rameau vert. qu’on a arraché et jeté dans la poussière, dans ta maison, afin qu’on ne le piétine point; et là, mets-le dans un vase d’eau ; il est vivant, lui aussi, et a droit à ta sollicitude. Il n’a pas autre chose que la vie silencieuse. Qu’au moins tu l’aides à en jouir. Vivre, c’est sa manière à lui — c’est la manière de tous les êtres de chair, à qui le mot n’a pas été donné, — d’être en harmonie avec l’éternel. Et vivre, pour toutes ces créatures, c’est le bonheur.

Mais ceux qui possèdent le mot, père de la pensée, et, parmi eux, les Forts surtout, ont autre chose à faire qu’à chercher à être “heureux”. Leur lâche supréme consiste à retrouver cette harmonie, cet accord avec l’éternel, dont le mot semble d’abord les avoir privés ; à tenir leur place dans la danse universelle des vivants avec tout l’enrichissement, toute la connaissance, que le mot peut leur apporter ou les aider à acquérir ; à vivre, comme ceux qui ne parlent pas, selon les lois saintes qui régissent l’existence des races, mais, celle fois, le sachant ci le voulant. Le plaisir ou le déplaisir, le bonheur nu l’inquiétude de l’individu ne comptent pas. Le bien-être, — au-delà du minimum qu’il en faut à chacun pour accomplir sa tâche — ne compte pas Seule compte la tâche : la recherche de l’essentiel. de l’éternel, à travers la vie et à travers la pensée.

Attache-toi à l’essentiel, — à l’éternel. Et ne te préoccupe jamais du bonheur — ni du tien, ni de celui d’autres hommes;

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mais accomplis ta tache, et aide aux autres à accomplir la leur, pourvu quelle ne contrecarre pas la tienne.

Celui qui possède le mot, père de la pensée, et qui, loin de le mettre au service de l’essentiel, le gaspille dans la recherche de satisfactions personnelles ; celui qui possède la technique, fruit de la pensée, et qui s’en sert surtout pour accroître son bien-être et celui des autres hommes, prenant cela pour la tâche majeure, est indigne de ses privilèges. Il ne vaut pas les tires de beauté et de silence, l’animal, l’arbre, qui, eux, suivent leur voie. Celui qui se sert des pouvoirs que lui donnent le mot et la pensée pour infliger la mot et surtout la souffrance aux beaux êtres qui ne parlent pas. en vue de son propre bien-étre ou de celui d’autres hommes : celui qui se sert de ses privilèges d’homme contre la nature vivante, pèche contre la Mère universelle — contre la Vie — et contre l’Ordre, qui veut que “noblesse oblige”. Ce n’est pas un Fort: ce n’est pas un aristocrate au sens profond du mot, mais un mesquin, un égoiste et un lâche, objet de dégoût aux yeux de l’élite naturelle.

Toute société, toute “civilisation” qui procède de la même aspiration au bien-être humain avant tout, au bien-être ou au “bonheur” humain à n’importe quel prix, est marquée du sceau des Puissances d’En-bas, ennemies du l’ordre cosmique dans le jeu sans fin des forces. C’est une civilisation de l’Age Sombre, si tu es obligé de la subir, subis-la en t’y opposant sans cesse, en la dénonçant, en la combattant toutes les minutes de ta vie. Mets ta gloire a hâter sa fin, — au moins à coopérer de tout ton pouvoir à l’action naturelle des forces qui la mènent à sa fin. Car elle est maudite. Elle est laideur et lâcheté organisées.

Défais-toi non seulement de la superstition du “bonheur”, si elle t’a jamais séduit, mais aussi de celle de l’homme. Garde-toi de l’attitude, aussi vaine que sotte, qui consiste à essayer d’“aimer tous les hommes” simplement parce que ce sont des hommes, Et si cette attitude n’a jamais été la tienne, si, dès l’enfance, tu as été imperméable à la propagande des dévots de “l’humanité”, rends grâces aux Dieux immortels auxquels tu dois cette sagesse innée. Rien ne t’interdit, certes, de tendre la main à un homme qui a besoin de secours, fût-il le plus dépourvu de toute valeur. Les Forts sont généreux. Mais alors, sois bon envers lui en tant que chair vivante, non en tant qu’homme. Et s’il s’agit de choisir entre lui et une créature privée

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du mot, mais plus près de l’archétype de son espèce qu’il ne l’est, lui, de celui de l’homme idéal, c’est-à-dire de l’homme supérieur, donne ta préférence et ta sollicitude à cette créature : elle est, plus que lui, une œuvre d’art de l’éternel Artiste.

Car “l’homme”, dont on fait tant de cas, n’est pas une réalité, mais une construction de l’esprit à partir d’éléments vivants, d’une déconcertante variété. Sans doute toute “espèce” est-elle une construction de l’esprit : son nom correspond à une idée générale. Mais il y a une différence énorme : ces réalités vivantes, que sont les individus de chaque espèce, se ressemblent. L’espèce existe en chacune d’elles. Tous les spécimens qui s’y rattachent reflètent l’éternel au même degré, ou à peu près. Les individus de même race, qui ne possèdent pas le mot, sont presque interchangeables. Leurs possibilités sont précises. On sait ce que gagne le monde des vivants toutes les fois que naît un petit chat; on sait ce qu’il perd toutes les fois que meurt un chat, jeune ou vieux. Mais on ne sait pas ce qu’il gagne — ou perd toutes les fois que naît un bébé d’homme. Car qu’est-ce qu’un homme ?

Le plus parfait spécimen de Nordique, dont l’âme est noble et le jugement ferme et droit, et dont les traits et le port sont ceux des statues grecques de la plus belle époque, est “un homme”. Un Hottentot, un Pygmée, un Papou, un Juif, un Levantin métissé de Juif, sont “des hommes”. “L’homme” n’existe pas. N’existent que de très diverses variétés de primates qu’il est convenu d’appeler “humaines” parce qu’elles ont en commun la station droite et le mot ; et celui-ci à des degrés très inégaux. Et à l’intérieur de la même race, — mieux encore; à l’intérieur du même peuple, — que d’insurmontables divergences, tant psychiques que physiques ; divergences que l’on voudrait pouvoir, même alors que la morbidité les explique en partie, attribuer à de lointains métissages, tant paraissent contre-nature de tels écarts entre individus d’un même sang. On est déjà choqué d’avoir si souvent à constater des oppositions idéologiques (ou religieuses) si violentes, entre frères de race. On l’est bien plus encore de savoir que, tandis que saint Vincent de Paul était Français, il existe des bourreaux d’enfants qui le sont aussi; ou de savoir que la belle et vertueuse Laure de Noves, comtesse de Sade, eut, quatre siècles après sa mort,

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parmi ses descendants, le marquis de triste mémoire qui porte le même nom.

Je le répète donc ; on ne sait pas, on ne peut pas prévoir, ce que le monde vivant gagne ou perd, toutes les fois que naît ou meurt un jeune être appelé humain. Et moins la race est pure, c’est-à-dire moins les possibilités de chaque bébé sont, au départ, et en gros, les mêmes, — et aussi, moins la société tend à couler tous les individus d’un même groupe dans un même moule, c’est-à-dire, moins elle tend à toujours encourager le développement des mêmes possibilités, et cela, en gros, dans le même sens, — moins il est possible de le deviner. Car alors, plus l’exception, — l’individualité inclassable, — sera fréquente au sein d’on groupe de même nom, ce “nom” ne correspondant plus à aucune réalité. Il sera relativement possible, et également facile, de prévoir, dans des circonstances précises, les réactions d’un membre de tribu amérindienne, africaine ou indienne — disons, d’un Jivaro, d’un Massai, ou d’un Santal demeuré dans son milieu naturel et soumis à sa tradition, — et celles d’un Aryen (Allemand ou non) qui est en même temps un Hitlérien orthodoxe. Il sera plus difficile de prévoir celles d’un quelconque Européen occidental non-engagé.

Il est vrai toutefois que, au-delà d’un certain degré de brassage de races et de milieux, et de conditionnement sur une vaste échelle, grâce à tous les moyens modernes de diffusion, les gens finissent par se ressembler étrangement, psychiquement, sinon physiquement ; à se ressembler dans la nullité. Ils croient tous faire preuve d’indépendance et d’originalité, et, en fait, leurs réactions en face de circonstances semblables sont aussi identiques que peuvent l’être celles de deux individus de la même tribu de Noirs ou de Peaux-Rouges, ou . . . celles de gens de même race, liés par la même foi. Les extrêmes se touchent. Le chaos ethnique que représentent les foules d’une métropole à l’avant-garde de toutes les techniques tend à acquérir une uniformité dans la grisaille, une sorte d’homogénéité factice — voulue par ceux qui contrôlent ces foules — sinistre caricature de la relative unité naturelle des gens de même sang, que tient une échelle de valeurs et des pratiques communes ; uniformité qui, loin de révéler une “âme collective”, à quelque degré d’éveil que ce soit, ne décèle que la déliquescence d’une société qui

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a définitivement tourné le dos à l’éternel — en d’autres termes : d’une société damnée.

Mais on peut encore parfois découvrir un individu exceptionnel au sein d’une telle société ; un individu qui méprise le chaos ethnique qu’il voit autour de lui et dont il est peut-être lui-même un produit, et qui, pour en sortir, adhère à quelque doctrine d’extinction de l’espèce, ou bien, se met tout entier au service d’une vraie race, avec tout le renoncement que cela comporte pour lui. Le mécanisme de l’hérédité est si complexe, et le jeu des influences extérieures si soumis au hasard, qu’il n’est pas possible de prévoir qui, parmi les enfants d’une société décadente, deviendra un tel individu, — pas plus qu’il n’est possible de prévoir quel membre nouveau-né d’une tribu aspirera un jour à autrechose qu’aux valeurs et idées reçues, ou quel enfant, élevé dans une foi particulière, s’empressera d’en sortir, dès qu’il le pourra.

L’exception est quelquefois probable et toujours possible dans un groupe humain, si homogène soit-il, — ce qui ne veut pas dire que, dans la pratique, on puisse ou même on doive toujours en tenir compte : cela compliquerait à l’infini les rapports entre groupes. D’ailleurs l’exception, si elle représente quelque chose de plus qu’elle-même, change de groupe, toutes les fois qu’elle le peut. S’il existait quelqu’Aztèque que choquait les sacrifices offerts aux Dieux de son peuple, il est à présumer que cet homme fut parmi les premiers à adopter la religion des conquérants espagnols ; et un Aryen d’Europe qui, à notre époque, n’éprouve que mépris pour les valeurs “chrétiennes et démocratiques” de l’Occident, et rêve d’une société à l’image de celle de la Sparte antique, adhère, s’il a le goût du combat, à la foi hitlérienne.

* * *

Il ressort de ces observations que le concept d’humanité ne correspond à aucune réalité concrète, séparable de celle de l’ensemble des vivants. Le mot et la station droite, seuls traits communs à tous les hommes, ne suffisent pas à faire de ceux-ci des “frères” dont n’importe lesquels seraient plus près les uns des autres que ne l’est l’un quelconque d’eux d’un être d’une autre espèce. Il n’existe donc aucune obligation morale d’aimer tous les hommes, à moins qu’on n’en postule une d’aimer tous

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les êtres vivants, y compris les insectes les plus nuisibles, car un homme (ou un groupe d’hommes) qui, par nature ou par choix, répand la laideur, le mensonge et la souffrance, est plus nuisible que n’importe quel insecte malfaisant. Il serait absurde de combattre l’un, et le moins puissant, donc le moins dangereux, tout en tolérant — et à fortiori, en “aimant” — l’autre.

Aime donc l’homme supérieur, l’Aryen digne de ce nom : beau, bon, et courageux ; responsable; capable de tous les sacrifices en vue de l’accomplissement de sa tâche ; l’Aryen sain et fort. C’est ton frère et ton compagnon d’armes dans la lutte de ta race contre les forces de désintégration ; celui dont les enfants continueront cette lutte sacrée aux côtés des tiens, quand ton corps sera retourné à ses éléments.

Respecte l’homme des races nobles, autres que la tienne, qui mène, dans un cadre différent, un combat parallèle au tien, — au nôtre. C’est ton allié. C’est notre allié, fût-il à l’autre extrémité du monde.

Aime tous les vivants dont l’humble tâche ne s’oppose en aucune manière à la tienne, à la nôtre : — les hommes au cœur simple, honnêtes, sans vanité et sans malice, et toutes les bêtes, car celles-ci sont belles, sans exception, et sans exception indifférentes à quelqu’ “idée” que ce soit. Aime-les, et tu sentiras l’éternel dans le regard de leurs yeux de jais, d’ambre ou d’émeraude. Aime aussi les arbres, les plantes, l’eau qui coule dans l’herbe et s’en va à la mer sans savoir qu’elle y va : aime la montagne, le désert, la forêt, le ciel immense, plein de lumière ou plein de nuages ; car tout cela dépasse l’homme et te révèle l’éternel.

Mais méprise la masse humaine au cœur vide, à l’esprit superficiel ; la masse égoïste, lâche et prétentieuse, qui ne vit que pour son propre bien-être, et pour ce que l’argent peut acheter. Méprise-la, tout en te servant d’elle, toutes les fois que tu le peux. Si elle est de notre race, et suffisamment pure, d’elle peuvent naître des enfants qui, éduqués par nos soins à une époque où nous aurons de nouveau notre mot à dire, vaudront infiniment plus qu’elle. C’est même là le meilleur, peut-être le seul service qu’elle puisse rendre. Toutes les fois qu’un homme de bonne race, joyeusement intégré à la “société de consommation”, te déçoit, dis-toi qu’il ne compte pas en tant qu’individu conscient ; que seul son sang compte. Vois en lui uniquement ce qu’un

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éleveur de chevaux ou de chiens de race considère en chacun de ses sujets : son pédigree. Et laisse-le parler : — ce qu’il dit, ce qu’il croit penser, n’a aucune importance.

Quant à l’ennemi des valeurs immuables, à l’ennemi de la Nature et de la Vie, — à celui qui voudrait sacrifier le plus beau au moins beau ou au franchement laid ; le fort au faible : le sain au souffreteux, voire au malade et au déficient ; celui qui s’érige, seul ou en groupe, contre l’éternel, combats-le de toute l’ardeur de ton cœur, de toute la force de ton bras, de toute l’efficience de ton intelligence. Il n’est pas nécessaire de le haïr, Il suit sa nature et accomplit sa destinée en s’opposant aux valeurs éternelles. Il joue son rôle dans la danse cosmique sans commencement ni fin. Mais, — et précisément pour cette raison — il est nécessaire et même urgent de le combattre, et par tous les moyens, sans trève et sans faiblesse. Car il est ton contraire absolu — notre contraire et, par conséquent notre ennemi naturel — dans l’impitoyable jeu des forces.

Combats-le avec détachement et de tout ton pouvoir : les Forts conservent un équilibre serein jusque dans le fanatisme le plus exaltant. Combats-le par la violence, combats-le sans violence — selon les cas. Combats-le en pensant jour et nuit à l’opposition qui existe entre ton rôle et le sien.

* * *

Ne sous-estime jamais les rites. Partout où ils existent règne un certain ordre. Et tout ordre implique soumission de la volonté individuelle, discipline, donc renoncement ; préparation à la recherche de l’éternel.

Toute religion véritable est une voie ouverte à ceux qui tendent vers l’éternel, consciemment ou non. Et il n’y a pas de vraie religion sans rites. Et dès qu’il y a des rites, si simples qu’ils soient, il y a ébauche de religion. Je dis “ébauche”, car si le rite est nécessaire, essentiel même, à toute vraie religion, il ne suffit pas à la créer. Il faut que s’y ajoute une doctrine qui soit une expression de la Tradition, c’est-à-dire qui aide le fidèle à vivre des vérités éternelles. Il est inutile de dire — car cela saute aux yeux — que, parmi les gens qui se rattachent nominalement à une religion donnée, chacun la vit plus ou moins, et que la grande majorité (du moins aux époques de décadence, telles que la nôtre) ne la vit pas du tout. On pourrait

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presque définir une époque de décadence en se contentant de dire que c’est une époque où les doctrines traditionnelles, c’est-à-dire celles qui élèvent les fidèles à la contemplation de l’éternel, cessent d’intéresser les hommes, à l’exception d’une infime minorité.

Aux siècles où la dégénérescence s’affirme et s’accentue, les doctrines proprement politiques prennent, dans l’esprit et le cœur de la plupart des gens, le pas sur les doctrines traditionnelles, généralement appelées “religieuses”, et — ce qui, peut-être, est pire encore, — les hommes se servent du nom de différentes religions pour mener des combats qui n’ont, comme fin, que des avantages personnels et matériels.

Les doctrines proprement politiques sont, contrairement à celles qui relèvent de la Tradition, centrées sur des préoccupations immédiates et des considérations tout au plus “historiques”, c’est-à-dire temporelles ; sur ce qui ne se reproduit pas, — ce qu’on ne verra pas deux fois. Une doctrine qui aide ses adhérents à résoudre des problèmes immédiats d’ordre politique. voire économique, tout en leur enseignant des vérités qui transcendent de loin ceux-ci, et en leur inculquant une échelle de valeurs correspondante, est autre chose qu’une doctrine politique. C’est une Weltanschauung, une “vision de l’Univers”. Il suffirait de lui associer des rites pour faire d’elle la base d’une religion. Et ceux de ses adhérents qui ont le sens du rite, le besoin du rite, — qu’ils expriment comme ils le peuvent en marquant les jours fastes ou néfastes, les anniversaires joyeux ou douloureux, liés à l’histoire de leur communauté ; en visitant, à certaines dates, des lieux riches, pour eux, de signification — sont déjà des fidèles.

Mais, je le répète : pour qu’une Weltanschauung, une vision de l’Univers, une “philosophie”, puisse, une fois pénétrée de la magie du rite, devenir la base d’une vraie religion, il faut non seulement qu’elle ne contienne aucune contradiction interne, mais encore que ses propositions fondamentales soient vraies, non relativement, mais absolument ; vraies dans tous les temps, et partout; vraies dans le temps et en dehors du temps; éternellement. Il faut, en d’autres termes, qu’elle ne repose sur rien moins que des lois du cosmos ; des lois de la Vie sans commencement ni fin ; des lois qui s’appliquent à l’homme, mais qui dépassent l’homme de même que tous les êtres finis. Il faut,

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en un mot, qu’il s’agisse d’une philosophie cosmique capable de s’intégrer dans l’éternelle Tradition.

Extrêmement rares sont les doctrines prétendues “libératrices”, et plus rares encore les doctrines politiques (fussent elles à base “philosophique”) qui remplissent cette condition. Si quelqu’une d’elles, tout en ne la remplissant pas, se laisse, sous la pression d’un besoin de l’âme humaine aussi vieux que l’homme, associer à des rites, elle tendra à donner naissance à une fausse religion, — à une organisation sacrilège, en d’autres mots, à une contre-Tradition. C’est, à notre époque, le cas du Marxisme, dans la mesure où un semblant de vie rituelle a commencé à s’y introduire. L’humble et sincère paysan slave qui, parmi beaucoup d’autres, attend, devant le mausolée de Lénine, la minute où il lui sera enfin permis de se recueillir en présence du corps, rendu artificiellement incorruptible, de l’homme qui a fait des idées du Juif Marx la base d’une révolution mondiale, est un fidèle. Il est venu là en pélerinage, nourrir son âme de dévotion, comme ses pères allaient s’incliner, dans quelqu’église célèbre, devant une icône miraculeuse. La nourriture de l’âme est demeurée, ou redevenue, pour lui, plus importante que celle de l’estomac. Il resterait, s’il le fallait, deux jours sans manger et sans boire, pour vivre la minute où il passera en silence devant la chair momifiée de Lénine. Mais l’âme vit de vérité ; de contact avec ce qui est, partout et toujours. Les contrevérités auxquelles elle croit la détournent de ce contact et la laissent, tôt out tard, sur sa faim d’absolu. Or, toute la philosophie de, Marx, reprise par Lénine comme fondement de l’Etat prolétarien, est basée sur des contre-vérités flagrantes : sur l’assertion que l’homme n’est pas autre chose que ce que son milieu économique fait de lui ; sur la négation du rôle de l’hérédité, donc de la race ; sur la négation du rôle des personnalités (et des races) supérieures dans le déroulement de l’histoire. L’homme sincère, religieusement dévoué aux maîtres qui ont ainsi érigé l’erreur en principe, et déchaîné, à partir d’elle, une révolution à l’échelle mondiale, sert sans le savoir les Forces de désintégration ; celles que, dans la terminologie plus ou moins dualiste de plus d’un enseignement traditionnel, on appelle “les Puissances de l’Abîme.”

Parmi les doctrines dites politiques du vingtième siècle, je n’en connais qu’une seule qui, tout en étant, en fait, infiniment

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plus que “politique”, remplisse la condition sine qua non, sans laquelle il n’est pas possible à une Weltanschauung, même avec l’aide du rite, de servir de base à une vraie religion, à savoir, qui repose sur des vérités éternelles, dépassant de très loin l’homme et ses problèmes immédiats, sans parler du peuple particulier auquel elle fut d’abord prêchée, et des problèmes qui étaient alors les siens. Une seule, dis-je ; et j’ai nommé le vrai racisme aryen, en d’autres termes, l’Hitlérisme.

* * *

Dans un passage de son roman “Les Sept Couleurs”, Robert Brasillach décrit la cérémonie de consécration des nouveaux drapeaux du Reich allemand, à l’une des grandes réunions annuelles de Nuremberg, à laquelle il était lui-même présent. Après le grandiose défilé de toutes les organisations qui dépendaient du Parti National-socialiste ou qui s’y rattachaient, le Führer s’avançait solennellement sous les yeux des cinq cent mille spectateurs, pressés sur les gradins de l’immense stade, sur qui planait un silence absolu. Il soulevait l’une après l’autre les bannières neuves, et les mettait en contact avec le “Drapeau du Sang” : l’étendard qu’avaient porté ses disciples de la première heure, lors du putsch du 9 novembre 1923, et auquel le sang des Seize, tombés ce jour-là, avait conféré un caractère sacré. A travers lui, chaque drapeau devenait semblable à celui-ci ; se “chargeait”, comme lui, de fluide mystique, par participation au sacrifice des Seize. Et l’écrivain français remarque, fort justement, à ce propos, que l’homme auquel le sens religieux de ce geste échappe, “ne comprend rien à l’Hitlérisme”. Il souligne, en d’autres termes, que ce geste est un rite.

Mais ce rite, qui s’ajoute d’ailleurs à beaucoup d’autres, n’aurait jamais suffi à donner à l’Hitlérisme le caractère d’une religion, si celui-ci n’avait pas déjà été une doctrine plus-que-politique : une Weltanschauung. Et surtout, il aurait été impuissant à faire de lui une vraie religion, si, à la base de cette Weltanschauung, il n’y avait pas eu des vérités éternelles, et toute une attitude qui n’était (et ne demeure), en dernière analyse, autre que la recherche même de l’éternel à travers ce qui passe — l’attitude traditionnelle par excellence.

Ces paroles peuvent sembler étranges en 1969, plus de vingt-quatre ans après la défaite de l’Allemagne hitlérienne sur

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le plan militaire, et l’effondrement de la structure politique qui avait été la sienne. Elles peuvent sembler étranges, maintenant que l’on chercherait en vain, dans tout l’espace géographique que couvrait le Troisième Reich, un signe visible de résurgence du National-socialisme tel que l’entendait le Führer, et que la plupart des organisations qui, au-delà des anciennes frontières du Reich, prétendent vouloir prendre la relève du Mouvement condamné, n’en sont ou bien que de pâles imitations sans âme, ou bien que de lamentables caricatures, parfois au service d’autres buts. Mais la valeur d’une doctrine, — sa vérité — n’a que faire avec le succès ou la faillite de ses adhérents sur le plan matériel. Ce succès ou cette faillite dépend de l’accord ou du non-accord de la doctrine avec les aspirations des gens, à un moment donné de l’histoire; et aussi du fait que ses adhérents sont ou ne sont pas, du point de vue militaire, du point de vue diplomatique, du point de vue de l’art de la propagande, capables de s’imposer — et par suite de l’imposer — à leurs adversaires. Le fait que la doctrine est ou n’est pas une expression de la vérité cosmique n’entre pas ici en ligne de compte. Mais il donnera à la longue raison ou tort à la doctrine, en ce sens qu’une société qui refuse d’accepter un enseignement en harmonie avec les lois éternelles, et lui préfère des contre-vérités, travaille à sa propre désintégration; en d’autres mots, se damne elle-même.

Il est exact que les Hitlériens ont été vaincus sur tous les fronts en 1945 ; il est exact que le Troisième Reich allemand a été démembré; que le parti national-socialiste n’existe plus ; qu’il n’y a plus, en Allemagne ou ailleurs, ni drapeaux à croix gammée aux fenêtres, ni rues qui portent le nom du Führer, ni publications d’aucune sorte qui exaltent son souvenir. Il est exact que des milliers d’Allemands ont appris à mépriser ou à détester Celui que leurs parents avaient acclamé, et que des millions ne s’intéressent pas plus à lui et à son enseignement que s’il n’avait jamais vécu. Il n’en demeure pas moins vrai que l’essence de la doctrine hitlérienne est l’expression même de lois éternelles ; de lois qui régissent non seulement l’homme, mais la vie ; qu’elle représente, comme je l’ai écrit dans un livre en langue allemande, “la sagesse de l’espace étoilé”1 et que le


1. “Die Weisheit des sternhellen Weltraumes”, dans “Hart wie Kruppstahl”, achevé en 1963 (Chapitre III).

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choix placé devant le monde est, en conséquence, le même après 1945 qu’avant. C’est l’acceptation de cette sagesse plus qu’humaine, c’est cet accord avec l’esprit de la Nature, qu’implique l’Hitlérisme, ou bien la désintégration, le chaos ethnique, la déliquescence de l’homme ; — la séparation d’avec l’Ame du cosmos ; la damnation. C’est, — et le mot est encore de moi — “Hitler ou l’enfer”.1

Les gens de notre planète semblent avoir choisi l’enfer. C’est ce qu’une humanité décadente fait invariablement. C’est là le signe même que nous sommes en plein dans ce que la tradition hindoue appelle le Kali Yuga ; — l’Age Sombre.

Mais les âges se succèdent. Les lois qui en règlent la succession demeurent.

Il est également exact que de très nombreux actes de violence ont été accomplis au nom de l’Hitlérisme, et que c’est même là ce que lui reproche si obstinément le troupeau des gens bien-pensants, des “honnêtes gens”, profondément attachés (en théorie au moins) aux valeurs humanitaires.

Il y a, toutefois, deux sortes d’actes de violence, — ou d’actes conduisant à la violence — “accomplis au nom d’une doctrine”. Il y a ceux qui, dans l’esprit de la doctrine, sont nécessaires, ou tout au moins justifiables, dans les circonstances dans lesquelles ils prennent place. Et il y a ceux qui ne le sont nullement, et dont les auteurs, loin d’être de vrais fidèles de la doctrine, dont ils exhibent les symboles visibles, ne représentent, en réalité, qu’eux-mêmes, et se servent du prestige de la doctrine, et de l’autorité qu’il leur confère, pour promouvoir leurs propres intérêts, pour assouvir des vengeances personnelles, ou simplement pour donner libre cours à leurs passions. Il y avait, du temps du Troisième Reich allemand, l’homme qui dénonçait un Juif parce que, très sincèrement, il le croyait dangereux au régime dans lequel il voyait le salut de son propre peuple. Et il, y avait l’homme qui dénonçait un Juif — qui profitait du pouvoir que le régime lui donnait, pour le dénoncer . . . parce qu’il convoitait son appartement. Il y avait le soldat — ou le fonctionnaire — qui obéissait aux ordres. Et il y avait l’homme qui, sous le couvert de l’autorité que lui donnait son uniforme, commettait,


1. “Hitler or Hell”, dans “Gold in the Furnace”, écrit en 1948–49, (p. 416).

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ou faisait commettre, sous l’empire de la colère, de la jalousie, ,ou simplement de sa brutalité naturelle ou en vue d’un malsain plaisir — des actes inutiles de violence, voire de cruauté, sans avoir reçu d’ordres. Il y a toujours eu, parmi les adhérents nominaux de toute doctrine, et à plus forte raison de l’une de celles qui ne répudient pas, en principe, la violence, des combattants sincères et des opportunistes ; des gens qui servent la cause à laquelle ils se sont donnés corps et âme, et des gens qui ont fait semblant de se donner à elle, et qui se servent d’elle. (Je dis bien de “la cause”, et non de “la doctrine”. Car on sert une cause, c’est-à-dire l’application d’une doctrine, la matérialisation d’un rêve dans le temps, que ce soit dans le sens du temps, ou à contre-courant. Une doctrine, elle, n’a que faire de “service”. Elle est vraie ou fausse ; en accord avec les Lois du cosmos, ou en désaccord avec elles. Toute la dévotion du monde, ajoutée au sacrifice de millions de martyrs, ne réussirait pas à la rendre vraie, si elle est fausse. Et la négation retentissante de ses propositions de base par tous les “savants” et tous les prêtres du monde, ajoutée à la haine de tous les peuples, dans tous les temps, ne réussirait pas à la rendre fausse, si elle est vraie).

Les actes injustifiés de violence commis, sous le couvert de la “raison d’Etat”, par des opportunistes déguisés en Hitlériens, ne touchent en rien la cause du Reich allemand : l’application de l’Hitlérisme aux problèmes de l’Allemagne, à une époque donnée ; cause que, d’ailleurs, ils desservaient, au lieu de la servir. Ils touchent encore moins la doctrine hitlérienne elle-même. Les actes de violence accomplis dans l’esprit de l’Hitlérisme — selon sa logique profonde — loin de mettre en question la vérité de celui-ci, la soulignent, au contraire. Car l’application d’une doctrine vraie — c’est-à-dire exprimant les lois mêmes de la vie — dans une société, même privilégiée, de l’Age Sombre, en d’autres termes, dans une société qui, avec l’humanité tout entière, est, malgré ses progrès sur le plan technique, et peut-être à cause d’eux, en régression du point de vue de la Nature, ne peut se faire que “contre le temps”; contre le courant universel de décadence qui caractérise l’Age Sombre. Et cela est matériellement impossible sans violence.

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Parmi les religions internationales prosélytisantes, il n’y a, à ma connaissance, guère que le Bouddhisme qui se soit répandu pratiquement sans violence. Et il est à remarquer que c’est la religion de renoncement, la religion “d’extinction” par excellence ; celle qui, appliquée, absolument, devrait, en exaltant l’état monastique, — comme le Jainisme, son contemporain, confiné, lui, aux Indes, et comme le Catharisme, bien des siècles plus tard — inciter l’homme à quitter la planète.

Le Christianisme, centré sur l’amour de l’homme, seul être vivant créé, (selon lui) “à l’image du Dieu”, ne s’est largement propagé que par la bribe ou par la violence, sous le patronage de rois ou d’empereurs qui ont cru servir leur intérêt en le proclamant religion d’Etat, et en l’imposant aux peuples conquis. D’innombrables crimes contre l’homme — et, en général, contre l’homme supérieur — ont marqué son expansion, depuis le massacre, en 782, par ordre de Charlemagne, à Verden sur l’Aller, de quatre mille cinq cents chefs germains, fidèles aux Dieux de leurs pères, jusqu’aux bûchers de la Sainte Inquisition, — crimes qui n’empêchent pas que tout ce que le Christianisme a pu retenir de l’éternelle Tradition, ne demeure inébranlable. Et il s’agit, ici, d’une religion dont le fondateur lui-même a déclaré que son royaume “n’est pas de ce monde” ; d’une religion, donc, à laquelle la violence est, en principe, étrangère. S’il est vrai que les actes de violence de ses fidèles ne diminuent en rien sa valeur, en tant que telle, il l’est d’autant plus que ceux des fidèles d’une doctrine, centrée, elle, non sur l’homme, considéré comme un être “à part’, mais sur la Vie, et la lutte sans fin qu’elle implique, — d’une doctrine comme l’Hitlérisme, dont l’esprit et l’application dans ce monde ne peuvent aller que contre le courant de notre époque, — n’altèrent, eux non plus, aucunement, l’excellence de celle-ci, en tant qu’expression de lois immuables.

Une doctrine strictement politique se juge à son succès. Une doctrine susceptible de recevoir la consécration du rite — et l’ayant déjà reçue — se juge à sa teneur d’éternité, quelles qu’aient pu être les conséquences heureuses ou malheureuses des efforts accomplis pour l’appliquer sur le plan politique.

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Le 28 Octobre 1953, devant quelques camarades, très peu nombreux, réunis à Holzminden an der Weser, l’Hitlérien Félix. F. me dit : “Jusqu’en 1945, nous étions un parti ; après 1945, nous sommes le noyau d’une grande foi internationale”. Il croyait sans doute que, même à une époque de déliquescence universelle, telle que la nôtre, les Forts de sang aryen étaient encore assez nombreux et assez conscients pour s’unir en une “grande foi internationale”, autour de la seule doctrine digne d’eux.

Seul l’avenir dira s ‘il avait raison ou non. Mais j’affirme dès maintenant que, même si, débarrassé de tout ce qu’il pouvait contenir de contingent, de temporel dans sa première expression, en tant que doctrine politique, l’Hitlérisme ne devait jamais parvenir à s’imposer à l’élite aryenne, partout où il en existe une, il n’en demeurerait pas moins la Voie des Forts, ouverte sur l’éternel ; leur ascèse, et cela, à toutes les époques de décadence accélérée ; à toutes les “fins de cycle”.

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Toutes les vraies religions, toutes celles qui peuvent s’intégrer dans la Tradition, mènent à l’éternel, certes. Mais elles n’y mènent pas toutes les mêmes gens. Les religions que j’ai appelées “d’extinction” telles que le Bouddhisme, le Jainisme, et plus tard le Catharisme, y mènent les las et les désespérés pour qui leur absence d’espoir est une souffrance ; les gens que la lutte sans fin rebute ou a brisés, et qui aspirent à “en sortir”. Les doctrines qui prêchent l’action dans le détachement et l’enthousiasme sans espoir, s’adressent aux Forts; à ceux que la lutte, même “inutile”, ne fatigue jamais; et qui n’ont besoin ni de la vision anticipée d’un paradis après la mort, ni de celle d’un “monde meilleur” pour leurs fils et leurs neveux, pour agir avec zèle et jusqu’au bout, selon ce qui est, pour eux, le devoir.

Le Varnashramdharma des Hindous — religion basée sur la hiérarchie naturelle des castes (donc des races, la caste hindoue étant héréditaire et n’ayant que faire avec les biens qui peuvent s’acquérir) et sur la succession naturelle des devoirs au cours d’une même vie d’homme, — est une religion des Forts. Il est dominé par l’enseignement de l’Action détachée, tel qu’il nous est parvenu dans la Bhagawad-Gîta. Il a été conçu comme base d’une société traditionnelle, déjà décadente, sans doute, — le fléchissement commence, dans chaque cycle temporel, dès la fin du

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premier Age, appelé Age de vérité, Satya Yuga, ou Age d’Or — mais sans commune mesure avec la nôtre; infiniment plus près qu’elle de l’ordre idéal ou ordre divin.

L’Hitlérisme considéré dans son essence, c’est-à-dire dépouillé de tout ce qui le rattache aux contingences politiques et économiques d’une époque, est la religion des Forts de race aryenne, en face d`un monde en déliquescence, d’un monde de chaos ethnique, de mépris de la Nature vivante, de niaise exaltation de “l’homme” dans tou ce qu’il a de faible, de maladif, de bizarrement “individuel”, de différent des autres êtres, d’un monde d’égoïsme humain (individuel et collectif), de laideur et de lâcheté. C’est la réaction de quelques Forts de cette race, originellement noble, devant un tel monde. Et c’est celle qu’ils proposent à tous leurs frères de race.

Il y a, parallèlement à lui, des religions qui exaltent les mêmes vertus, la même ascèse de détachement ; qui reposent sur la même glorification du combat sans fin et le même culte du Sang et du Sol, mais qui s’adressent à d’autres races, — religions, parfois très vieilles, — mais continuellement rajeunies, repensées, grâce à la vitalité de leurs fidèles. Le Shintoïsme, basé sur la déification des héros, des ancêtres, du Soleil, et du sol même du Japon, en est une. Un Japonais ne me disait-il pas en 1940 : “Votre National-socialisme est, à nos yeux, un Shintoïsme d’Occident ; c’est notre propre philosophie du monde, pensée par des Aryens, et prêchée à des Aryens”. Hélas ! A Gamagori, pas loin d’Hiroshima, les Japonais ont élevé un temple à Tojo et à ceux que les vainqueurs le 1945 ont tués avec lui comme “criminels de guerre”. Quand verra-t-on en Allemagne des monuments sinon des “temples” à la gloire de tous les Allemands, pendus le 16 Octobre 1946 et après, jusqu’au 7 Juin 1951 inclus, pour avoir été fidèles à leur foi, qui est aussi la nôtre, et avoir fait leur devoir.

Mais ceci est une autre question.

Revenons à ce qui fait l’éternité de l’Hitlérisme, c’est-à-dire au caractère non seulement plus-que-politique mais plus qu’humain — cosmique — de ses vérités de base, en particulier de toutes celles qui concernent la race, réalité biologique, et le peuple, réalité historique et sociale.

Le Führer a dit à chacun de ses compatriotes et, par delà ceux-ci, à chacun de ses frères de race et à tout homme de bonne

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Race : “Tu n’est rien ; ton peuple est tout”. Il a, d’autre part, dans le Point Quatre des fameux Vingt-Cinq Points qui constituent le programme du Parti national-socialiste, indiqué ce qui, à ses yeux, faisait l’essentiel du concept de “peuple” : “Ne peut être citoyen de l’Etat que celui qui est membre du peuple. Ne peut être membre du peuple (allemand) que celui qui est de sang germanique”. D’où il découle qu’aucun Juif ne être citoyen de l’Etat (allemand).1

C’est le retour pur et simple à la conception antique du peuple : à celle des Germains, certes, mais aussi à celle des Grecs, à celle des Romains d’avant l’Empire ; à celle des gens de tous les peuples, ou presque. C’est la négation de l’attitude romaine des siècles de décadence, qui admettait, elle, que tout habitant de l’Empire, tout sujet de l’Empereur, pouvait devenir “citoyen romain”, fût-il Juif, comme l’était Paul de Tarse, ou Flavius Josèphe, ou Arabe, comme l’Empereur Philippe, — et, plus tard, qu’il suffisait d’être “Chrétien”, et de la même Eglise que l’empereur, pour être “citoyen” byzantin, capable d’accéder aux plus hautes charges.2 C’est la négation de l’idée de “peuple” et de “citoyen” telle que l’a présentée la Révolution Française, du moment où, sous la suggestion de l’Abbé Grégoire et d’autres encore, l’Assemblée Constituante proclama “Français”, tous les Juifs demeurant en France et parlant français.

En d’autres termes, si un peuple est une réalité historique et sociale, si des souvenirs communs, glorieux et douloureux, des coutumes communes et, en général une langue commune, sont des facteurs de cohésion entre ses membres, il est aussi plus que cela. Il se rattache à une grande race. C’est un peuple aryen ou mongolique, australoïde, nègre ou sémitique. Il peut, sans cesser d’être un vrai peuple, contenir une proportion plus ou moins grande de sous-races différentes, pourvu que celles-ci fassent toutes partie de la grande race à laquelle il se rattache. (Le Führer lui-même était, physiquement, aussi “Alpin” que Nordique, et peut-être plus. Le brillant et fidèle Goebbels était un Méditerranéen presque pur. Et ce ne sont pas les seuls grands Allemands ni les seuls personnages de premier plan du Troisième Reich à ne pas être des Nordiques cent pour cent.)


1. Texte du Point Quatre des Vingt-Cinq Points.
2. Comme Léon “l’Arménien”, qui accéda au trône de Byzance.

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C’est la race au sens large du mot qui donne au peuple son homogénéité dans le temps; qui fait qu’il demeure, malgré les bouleversements politiques et économiques, toujours le même peuple, et que l’individu, en renonçant à soi-même pour se mettre totalement à son service, se rapproche de l’éternel.

On pourrait sans doute dire que ni le peuple ni la race ni l’homme — ni même la vie sur une planète donnée — ne dure toujours. D’ailleurs la “durée”, qui est “temps”, n’a que faire avec l’éternité intemporelle. Ce n’est pas la succession indéfinie des générations, physiquement et moralement plus ou moins semblables les unes aux autres, mais l’Archétype idéal duquel ces générations se rapprochent dans une certaine mesure; c’est le type parfait le la race, vers lequel chaque spécimen de cette race tend plus ou moins, que nous considérons quand nous parlons de l’“éternité de la race”. Le peuple qui, seul au milieu du chaos ethnique qui s’étend de plus en plus, partout, sur terre, “consacre toute son énergie” à sauver du métissage et “à promouvoir ses meilleurs éléments raciaux”, écrit le Führer, “est sûr de parvenir tôt où tard à la maîtrise du monde”1, (pourvu, naturellement, qu’il s’agisse d’un peuple dynamique et créateur.) En effet, il vivra, lui ; il demeurera un vrai peuple, tandis que chacun de ses compétiteurs, de plus en plus envahi, submergé d’éléments hétérogènes, aura cessé d’en être un, — et par là même, cessé de mériter (et de susciter) le sacrifice des individus de valeur.

L’homme sincère qui, en accord avec l’esprit du racisme aryen, c’est-à-dire de l’Hitlérisme, ou de tout autre racisme noble, s’efface devant un vrai peuple qui est le sien ; qui, afin de le servir, lui avant tout, piétine l’intérêt personnel, l’argent, le plaisir, la gloire de son propre nom, se rapproche de l’éternel. Son civisme est dévotion et ascèse.

Encore faut-il que ce soit un vrai peuple qu’il serve. Car celui qui se dévoue à un “peuple” métissé, autrement dit à une collectivité humaine sans race et sans caractères définis, qui n’a de “peuple” que le nom, perd son temps. Son activité est un peu moins choquante que celle des gens qui se consacrent au service des handicapés, des retardés, des défficients, des déchets humains de toutes sortes, car le métis, s’il est sain de corps,


1. “Mein Kampf”, édition allemande de 1935, p. 782.

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est malgré tout utilisable. Il vaudrait tout de même mieux, pour un individu de valeur, surgi exceptionnellement d’un “peuple” qui n’en est pas un, qu’il se dévoue en toute humilité à un vrai peuple de race supérieure, ou qu’il se contente de servir la vie innocente, la belle vie non-humaine; qu’il défende la bête et l’arbre contre l’homme, ou, s’il le peut, qu’il combine les deux activités. Peut-être alors, — si la croyance répandue aux Indes correspond à la réalité inconnue — renaîtra-t-il un jour dans une communauté humaine digne de lui . . . à condition qu’il n’agisse point en vue d’un tel honneur ; qu’il ne le désire jamais.

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N’oublie jamais que la race — l’Archétype racial vers lequel tendent (avec plus ou moins de succès) toutes les générations de même sang est l’éternité visible et tangible, concrète, en quelque sorte, et la seule éternité qui soit à la portée de tous les vivants, en conséquence de quoi, simplement en la vivant, — en prolongeant fidèlement et immuablement leur espèce, sans aucune pensée, — ils sortent déjà du Temps, par la porte du renoncement individuel.

Il est curieux que, plus les êtres sont étrangers au mot et à la pensée, et plus ils sont inébranlablement fidèles à la race.

Si l’on admet, comme je le ferais volontiers, que “le Divin dort dans la pierre, s’éveille dans la plante, sent dans l’animal, et pense dans l’homme” (ou du moins dans certains hommes) on admirera d’abord, chez tous les corps d’une même famille chimique, c’est-à-dire d’une structure atomique analogue, cet accord parfait avec le “type” qu’ils représentent et qu’ils ne peuvent nier, accord que nous appelons leur fonction commune. On admirera aussi, et non moins, la fidélité des végétaux, — du chêne, du cèdre, du banyan conquérant, jusqu’au vulgaire pissenlit, chacun à sa race. Il n’est pas question ici de métissages spontanés. Il n’en est pas question non plus chez les animaux tant que ceux-ci demeurent “à l’état naturel” c’est-à-dire hors de contact avec l’homme, ni même chez les hommes dits les plus “primitifs — chez ceux qui sont restés, ou sont en train de descendre (par la pauvreté du mot et l’absence croissante de pensée), au niveau des primates privés de langage articulé, ou plus bas encore. Le métissage a commencé avec le mauvais orgueil né du mot : l’orgueil qui a poussé l’homme à se croire un être à part et à se regimber contre les lois d’airain qui le rattachent à la terre et à

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la Vie ; qui lui a fait creuser un fossé imaginaire entre lui-même et le reste des vivants ; qui l’a incité à jucher son espèce tout entière sur un piédestal ; à mépriser, au nom de la fausse fraternité du mot, les flagrantes inégalités raciales qui y existent, et à penser qu’il pouvait impunément faire fi de l’interdiction de rapprocher ce que la Nature a separé ; qu’il était, lui, l’être “supérieur”, au-dessus de cette interdiction, au-dessus des lois divines.

L’Hitlérisme représente, en plein chaos ethnique, en pleine époque de décadence physique et morale du monde, le suprême effort en vue de ramener l’Aryen pensant au respect de l’ordre cosmique tel qu’il s’affirme dans les lois de développement, de conservation et de désintégration des races; en vue de le ramener de son plein gré à la soumission à la Nature, notre Mère, et d’y amener, de gré ou de force, l’Aryen non-pensant, mais néanmoins précieux à cause des possibilités de sa descendance. Le culte du “peuple” — à la fois du Sang et du Sol — mène au culte de la race commune des peuples de même sang, et à celui des Lois éternelles qui en régissent la conservation.